Jazz en Scènes, un événement national
Ce soir c’est la grande nuit des clubs. Dans toute la France, une soixantaine de formations regroupant plus de cent cinquante musiciens participent à un grand festival éclaté ans toutes les salles de la Fédération des Scènes de Jazz et de Musiques Improvisées. Chaque salle programme trois groupes : une révélation régionale ( à Carré Bleu, c’est l’étonnant Couartêtte de l’accordéoniste poitevin Emmanuel Roux), un groupe soutenu par un autre club (c’est le trio de « Popov » Chevalier, avec l’immense guitariste britannique Keith Rowe et le jeune surdoué Christophe, Havard, proposé par le Pannonica à Nantes, tandis que nos couleurs sont défendues  à Brest, au Vauban, par le trio Fréboeuf-Souriau-Beausset) et une tête d’affiche. Le nôtre est exceptionnelle et internationale puisqu’elle rassemble l’allemand Peter Brötzmann, le « colosse de Wupperthal », et ses amis Kent Carter et David Holmes, un américain et un britannique qui not choisi de vivre en France. 

Le rural swing Couartêtte 
Après avoir étudié la composition et l’orchestration avec Yvan Jullien, Emmanuel Roux a étudié le piano avec Emmanuel Bex, Bojan Z. puis Benoît Delbecq, avant d’opter pour l’accordéon et créer le Rural Swing Couartêtte pour lequel le Conseil Régional vient de lui accorder un Défi Jeunes. A partir de valses, de javas, de fox-trot, de rocks country gentiment traditionnels, il développe des improvisations déjantées, faites de ruptures ou de superpositions de rythmes, de dissonances atonales, d’emballements free, de gags musicaux inattendus. Une musique populaire et savante, plein de swing et d’humour. 

Chevalier – Rowe –Havard Trio  
Jean « Popov » Chevalier, batteur tout terrain qui a accompagné, dans les années 60, Dexter Gordon ou James Moody, et qui joue aujourd’hui, dans « 0% de Matière Grise » avec Jacques Di Donato, Fabrice Charles et Patrick Auzier, vient enfin de créer son propre trio. Il y a invité Keith Rowe, précurseur génial de l’improvisation libre à la guitare préparée, qui a eu une influence déterminante sur l’évolution actuelle de la guitare (il fonda le groupe mythique AMM qui conciliait le jazz, Cage, Varèse et les musiques chinoises et japonaises), et Christophe Havard, un jeune saxophoniste dont la passion pour l’improvisation l’a déjà amené à jouer avec des « pointures » telles que TIm Berne, Evan Parker ou Steve Potts. Le geste musical habité par l’émotion. 

Peter Brötzmann Trio 
Depuis la révolution free, Peter Brötzmann a imposé sa voix unique, originale, reconnaissable dès les premières notes, tant en Europe qu’au Japon ou aux Etats-Unis (des musiciens noirs américains reconnaissent, aujourd’hui ce qu’ils lui doivent) Une voix puissante, véhémente, violente, écorchée, gonflée d’émotion et de colère, au lyrisme bouleversant. Peter Brötzmann est un géant de l’improvisation, de la stature de ses héros (Sydney Bechet, Sonny Rollins, Ornette Coleman, Albert Ayler…) qui travaille aussi bien avec Nam June Paik, Mauricio Kagel ou Krysztof Penderecki qu’avec un joueur de guembri marocain et la jeune avant-garde de Chicago. Dans ce trio, il retrouve un autre géant du jazz actuel, Kent Carter (tous deux ont joué, entre autres, avec Carla Bley, Don Cherry, Derek Bailey ou Steve Lacy) et le batteur atypique David Holmes qu’on a déjà entendu avec Beñat Achiary, Bernard Lubat, Paul Rogers, Keith Tippet, Evan Parker ou Joe McPhee. Le souffle le plus brûlant du jazz d’aujourd’hui.